L'une des convictions les plus répandues dans notre société est que les mathématiques sont réservées à une élite génétiquement prédisposée… Et cette conviction est la cause d'innombrables frustrations, tant chez les élèves que chez leurs professeurs !
Dans le cadre du collège, cette affirmation est un mensonge aux conséquences gravement destructrices.
Entendons-nous : il est évident que tous les ados ne deviendront pas Evariste Galois ou des médaillés Fields...
Mais les mêmes ados ne deviendront pas tous non plus Arthur Rimbaud (ou Marguerite Yourcenar), ni des prix Nobel de littérature, et pourtant, ils ne passent pas leur temps à entendre - et a répéter - que le français, ce n'est vraiment pas leur truc, et que de toute façon, dans leur famille...
Encore une fois, il s'agit ici des mathématiques au collège !
De quoi un collégien a-t-il besoin pour maîtriser ces mathématiques là ?
Posons la question autrement : de quoi un collégien a-t-il besoin pour maîtriser le français au collège ?
De savoir lire, de connaître le sens des mots, d'avoir suffisamment de mémoire et d'imagination pour enregistrer une phrase et l'interpréter, d'avoir acquis un vocabulaire et une connaissance de la syntaxe suffisants pour, à son tour, composer des phrases qui sauront correctement traduire ses pensées... Et d'accepter de formuler lesdites pensées !
Et maintenant, reprenons : de quoi un collégien a-t-il besoin pour maîtriser les mathématiques au collège ?
De savoir lire, de connaître le sens des mots, d'avoir suffisamment de mémoire et d'imagination pour enregistrer une phrase et l'interpréter, d'avoir acquis un vocabulaire et une connaissance de la syntaxe suffisants pour, à son tour, composer des phrases qui sauront correctement traduire ses pensées... Et d'accepter de formuler lesdites pensées !
Quelle(s) différence(s) avec le français ?
Elles vont toutes dans un sens favorable aux maths :
les mots du vocabulaire mathématique qu'ils doivent maîtriser sont bien moins nombreux que ceux du français (une petite centaine de mots, contre plus de 2000).
La syntaxe des phrases mathématiques est bien plus simple, bien plus rigide, disons-le, bien plus pauvre que celle d'une phrase de français.
L'imagination nécessaire, même si elle est tout aussi fondamentale, ne s'applique qu'à peu de situations (quelques positions particulières de points, de lignes ou de surfaces simples, quelques configurations numériques...) alors qu'en français, l'imagination requise fait appel aux innombrables sujets de nos sociétés, du plus vaste au plus intime !
Parents, si vous lisez l'anglais, lisez cet article …Et sinon, cet article, qui vous en donnera l’esprit !
Parents, s'il vous plaît, arrêtez de « rassurer » vos enfants en leur expliquant combien vous étiez « nuls en maths » ! Si vous l'étiez, ce n'était pas une question de neurones ni de prédisposition quelconque, mais vraisemblablement parce qu'on vous demandait de disséquer des objets dont vous ne saviez pas vraiment ce qu'ils étaient : quelle qu'en soit la raison, vous en gardiez une définition beaucoup trop vague, trop floue, trop fausse - voire trop incomplète - pour pouvoir vous y intéresser.
Essayez de donner du sens à la phrase « je mange une barre de chocolat » si vous ne savez pas que le verbe est « mange » et pas « barre », que « je » n'est pas un « jeu », que « barre », dans ce contexte, n'est pas une longue tige d'acier et que « chocolat » n'est pas une couleur !
Parents, laissez une chance à vos enfants d'aimer les mathématiques : dites-leur que vous regrettez (même si ce n'est pas vrai !) de ne pas avoir eu la chance - ou la possibilité ? - d'en comprendre et d'en apprendre les mots suffisamment bien pour pouvoir jouer avec... Et insistez pour qu’ils prennent le temps, pour qu'ils fournissent l'effort, eux, de le faire.
Vous ne le regretterez pas, et eux non plus !
Un des cris du cœur que je préfère, lorsque je reviens avec un élève a priori rétif sur une définition, une situation, un raisonnement : « C’est juste ça ? Ben, finalement, c’est facile ! »
Philippe Colliard.
Philippe Colliard.