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jeudi 11 septembre 2014

Anniversaire



Septembre est, pour moi, une période d'anniversaires. De ma famille, du mien, d'amis, d'enfants d'amis, qui sont - ou qui ne sont plus.

Ce fut aussi, l'an dernier, la naissance de «... Donc, d'après... ».

Je lui souhaite longue vie, mais je voudrais également en profiter pour préciser ce que ce livre est - à mes yeux - ou n'est pas : que ce soit dans des correspondances privées, des listes de collègues ou des forums, si l'accueil en a été généralement positif, quelques remarques virulentes (bien souvent dues à un quiproquo) me l'imposent.

Deux sortes de reproches m'ont été adressées : sur le style, sur le fond.

Sur le style, d'abord : un tutoiement condescendant, la recherche artificielle d'une complicité primaire avec mes lecteurs, des « pseudo - interventions » peu crédibles de mes personnages
(je devrais dire : des personnages dessinés par ma fille).
Je crois m'en être déjà expliqué : j'ai réellement essayé de retracer au long de ce livre l'atmosphère de mes cours et de mes ateliers, telle que je l'ai vécue, telle que la très grande majorité de mes élèves l'a vécue.
Telle également que mes collègues et stagiaires l'ont vécue au cours de nos diverses réunions - sérieuses sur le fond, amicales et décontractées sur la forme.
Mes élèves n'ont, je pense, jamais ressenti ni de condescendance ni d'artifice dans mon comportement.
Et je voudrais encore ici remercier Olivier Leguay ( Inclass@blεs Mathématiqu€s 2.0 ), qui l’a si bien exprimé dans son article du 6 décembre sur «... Donc, d'après... »  :

« Philippe Colliard a passé beaucoup de temps pour penser et écrire cette géométrie qu'il explique au lecteur, supposé être un collégien et qu'il tutoie dès le début du livre. Ce n'est pas le tutoiement de celui qui sait devant l'ignorant, mais plutôt 
de l'ami qui t'emmène par la main pour te montrer un chemin que tu ne pourrais pas parcourir tout seul, par peur, par ignorance de son existence ou par manque de forces... »

(Vous pouvez retrouver cet article et quelques autres commentaires
en cliquant sur « ... Donc, d'après : extraits » puis sur "Commentaires")

Sur le fond, maintenant :

Étrangement, on m'a reproché soit d'en faire trop, soit de ne pas en faire assez.

En faire trop, parce que personne - ni collégien(ne), ni lycéen(ne), ni étudiant(e), ni professeur(e) ne pouvait - ne devait ! – envisager de s'approprier l'intégralité de cette construction axiomatique.

Ne pas en faire assez, parce que ladite construction axiomatique n'est pas un modèle de pureté : j'y mêle allègrement certains axiomes d’Euclide puis de Hilbert à ce que quelques-uns de mes lecteurs ont appelé des « axiomes pédagogiques », et qui ne sont qu’une expression simplifiée, voire diluée, d'autres axiomes.

Eh bien, dans les deux cas, c'est vrai - et je plaide coupable !

En faire trop :

Mais le but de «... Donc, d'après... » n'a jamais été d'être assimilé de la première à la dernière page ! J'ai conçu ce livre comme une sorte de « Bescherelle » ™ de la géométrie dans le secondaire. QUI connaît le « Bescherelle » par cœur ? En revanche, lorsque vous avez besoin de lui, vous savez qu'il est là .

Je n'ai jamais non plus pensé que nous, professeurs, devions enseigner à nos élèves les quelques 200 théorèmes, avec leurs démonstrations, et les quelques 150 définitions qu'il contient.

Mon but était simplement d'encourager le lecteur à construire des raisonnements - en partant d'un ensemble raisonnable d'affirmations de base.
De construire au cours de l'année quelques parcelles de la géométrie du collège, à partir d'une « axiomatique simplifiée », accessible à des utilisateurs de ce niveau.
Peut-être une dizaine de théorèmes, pas plus.

Pourquoi ? Parce qu'il me semble que de plus en plus, cette géométrie du collège dérive vers une simple technique d'application, que les théorèmes - toujours les mêmes - ne deviennent plus que des outils livrés « clés en main », des sortes de boîtes noires dont le champ d'application lui-même se recroqueville. Et cela me désole.
Cela me désole parce que la force de la géométrie, la vraie force de la géométrie au collège, peut-être de donner aux élèves le goût du raisonnement - de les amener à se rassurer sur eux-mêmes, à découvrir qu'ils savent raisonner. Oui, tous.
Puis d'apprendre à la majorité d'entre eux à affiner, à maîtriser cette capacité de raisonnement.

Ne pas en faire assez :

Pour quelques autres lecteurs, tout de même assez rares, il est inexcusable que ma construction axiomatique ne s'appuie pas sur la source pure des axiomes de Hilbert. L'un de ces critiques a même écrit que c'était une « faute » d'utiliser le mot « métaxiome », qui n'existait pas.
Eh bien, maintenant, ce mot existe. Et «... Donc, d'après... » Existe également !

Sorti du contexte de ce livre, ce critique à raison, et si j'avais cherché à soutenir une thèse sur l'axiomatique, non seulement j'aurais tort, mais j'aurais fait preuve d'une prétention épouvantable.
Seulement «... Donc, d'après... » n'est pas le mémoire d'une thèse : c'est un outil pédagogique.
Un outil qui essaie de mettre l'axiomatique à la portée de tous, au prix de quelques (rares) libertés.

Et si la base de « l'axiomatique simplifiée » que j'utilise est impure, c'est que me restreindre aux axiomes de Hilbert m'aurait contraint, par la suite, à des échappatoires du type : cette affirmation se démontre (ce n'est pas un axiome) mais je ne peux pas le faire ici !
Ou, ce qui aurait été une façon encore plus efficace de rebuter mes lecteurs, à parsemer ce livre de démonstrations d'un niveau qui n'a rien à voir avec le collège.

Parfois, sous un ciel de nuages noirs, je me dis que tout cela est bien vain, et que je serais tellement mieux à fainéanter dans une petite crique lointaine, à l'ombre d'un olivier, à écouter le clapotement de la Méditerranée.
Et puis je relis une critique positive, ou je « skype » avec mon ami Mathieu, qui vit en Espagne et dont l'implication est pour beaucoup dans l'existence de mon livre... Ou avec d'autres amis, géographiquement plus proches.

Et ça repart !

Merci à tous, encore une fois, d'être fidèles à ce blog... Et à «... Donc, d'après... », à qui je souhaite, pour cet anniversaire, d'être un jour présent dans tous les CDI de France !

A bientôt

Philippe Colliard

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