A l'origine de cet article, comme bien souvent, une petite
bouffée d’agacement face à la trop grande tolérance – parfois la trop grande
intolérance ! – dont nous faisons parfois preuve dans notre écriture. Je voulais exprimer à nouveau mon goût d'une «
rigueur raisonnable » - par opposition à une rigidité ou un laxisme excessifs
dans le vocabulaire ou les expressions que nous employons.
Mais je ne suis pas
toujours maître de mes pensées : sagement, au début, elles se sont penchées sur
quelques mots-clés, mal définis ou mal utilisés... Et puis, elles se sont
focalisées sur « le PGCD de... ».
Elles ont gagné, l'article sur la rigueur raisonnable
attendra !
« Le PGCD de 1650 et de 4400 est 550 »
La forme :
pourquoi continuer à utiliser une expression doublement
condamnable ?
D'une part, il y a bien longtemps - depuis la fin de la
langue francique - que l’antéposition n'est plus de règle pour les adjectifs :
dites-vous « le commun sort... » ou « le sort commun... » ?
D'autre part, la langue française a une syntaxe bien
établie, et « le sort commun de l'un
et de l'autre » n'y est pas
acceptable... Même s'il peut-être commun à
l'un ou à l'autre d'entre nous de
l'oublier :)
Je parlerai donc ici du «PGDC à 1650 et à 4400 » !
Le fond, maintenant :
depuis que l'arithmétique a disparu des programmes du
collège, la recherche du PGDC à deux nombres perd fortement de son
intérêt : dans de nombreux brevets, elle n'a servi qu'à répondre à des
questions palpitantes de
style…
… Artistique
:
Un
fleuriste dispose de 126 iris et 210 roses.
Il veut,
en utilisant toutes ses fleurs, réaliser des bouquets contenant tous le mêmenombre d’iris et le même nombre de roses.Quel nombre maximal de bouquets peut-il réaliser ?
… Guerrier
:
6 510
fourmis noires et 4 650 fourmis rouges décident de s’allier pour combattre les termites.
Pour
cela, la reine des fourmis souhaite constituer, en utilisant toutes les
fourmis,des
équipes qui seront toutes composées de la même façon : un nombrede
fourmis rouges et un autre nombre de fourmis noires.Quel est le nombre maximal d’équipes que la reine peut ainsi former ?
… Gourmand :
Un pâtissier dispose de 411 framboises et de 685 fraises.
Afin de préparer des tartelettes, il désire répartir ces fruitsen les utilisant tous et en obtenant le maximum de tartelettes identiques.1. Calculer le nombre de tartelettes.2. Calculer le nombre de framboises et de fraises dans chaque tartelette.
Je ne me moque pas : étant donné les contraintes imposées, je n'aurais
certainement pas fait mieux que les collègues... Mais franchement, vous croyez
vraiment qu'un pâtissier va prendre le temps de compter une à une ses
framboises et ses fraises ? Et va être suffisamment névrosé pour tenir
absolument à ce que toutes ses tartelettes soient « identiques » ?
Depuis quelques années, le PGDC à deux nombres n'est bien
souvent plus qu'une touche de la calculatrice, une application qui tente
d'assimiler les mathématiques à une technique.
Et pourtant... Il y a du raisonnement, derrière. Un
raisonnement parfaitement accessible à des collégiens. Des mathématiques, quoi
!
Il y a également cette fenêtre - bon, ce tout petit hublot -
vers l'arithmétique. La seule échappée qui y mène encore, au collège (depuis
que le PPMC à deux nombres a disparu des programmes).
L'arithmétique, bien que l'une des branches les plus
complexes des mathématiques, en est également, par ses questions comme par
certaines de ses applications, l'une des plus intéressantes à
vulgariser... Et propre à « accrocher », le temps d'une ou deux séances, de
nombreux élèves apparemment allergiques aux mathématiques.
Il y a enfin ce lien très fort entre le PGDC (et le PPMC) à
deux nombres et les mathématiques ensemblistes : à tout entier supérieur à 1
correspond ce qu'on appelle souvent sa
« décomposition en facteurs premiers ».
Je n'aime pas trop cette idée de décomposition
- elle ne sent pas très
bon :) - et elle contraint à préciser « unique, à l'ordre près ».
Je
préfère associer à chacun de ces entiers l'ensemble
des entiers premiers qui le composent, chacun de ces entiers étant indexé en a
à sa première apparition, en b à la suivante, etc.
par exemple, à l'entier
550 correspond l'ensemble { 2a , 5a , 5b , 11a
}. Comme un ensemble est indépendant de l'ordre dans lequel ses éléments sont
listés, il correspond bien à chaque entier supérieur à 1 un ensemble unique de
ce type.
Par analogie avec les rubans de bandes verticales qui permettent, par
irradiation, d’identifier des minerais sans les broyer (sans les « décomposer
»), il m'a semblé raisonnable d'appeler
« spectres d'entiers » les ensembles en
question (si je me suis permis de leur donner un nom, c'est qu'apparemment,
personne d'autre ne l'avait fait !)
{ 2a , 5a , 5b , 11a
} est donc le spectre de 550.
Quel intérêt, me direz-vous (peut-être), et qu'est-ce que
cela a à avoir avec le PGDC à deux nombres ?
Cela a tout à
voir !
Plus au collège, maintenant, et, bien sûr, je le regrette.
Est-ce une raison pour ne pas en parler ?
Le spectre de 1650 est { 2a , 3a , 5a
, 5b , 11a } ,
celui de 4400 est { 2a , 2b
, 2c , 2d , 5a , 5b , 11a
}.
L'intersection de ces spectres est { 2a , 5a
, 5b , 11a } …
C'est-à-dire le spectre de leur PGDC !
Et l'ensemble de leurs diviseurs communs est composé des
entiers dont les spectres sont les parties (les sous-ensembles) valides de ce
spectre :)
De la même façon, leur réunion est le spectre de leur PPMC...
Et l'ensemble de leurs multiples communs est composé, à son tour, des entiers dont
les spectres sont les sur-ensembles valides de ce spectre.
Vous pouvez,si vous le souhaitez, lire, télécharger, modifier et utiliser mes feuilles de cours de 3ème sur ce thème, en cliquant sur « ébauches, servez-vous » puis sur "PGDC à 2 entiers"...
...vous trouverez au même endroit une page qui fait le lien
entre d'une part, 550 et ses (autres) diviseurs, et d'autre part le spectre de
550 et tous ses (autres) sous-ensembles :
"Spectres et diviseurs : un exemple".
"Spectres et diviseurs : un exemple".
J'aime beaucoup cette feuille et vous
pouvez également en faire ce qu'il vous plaira...
Mais je ne suis pas sûr que
ce serait une bonne idée de l'utiliser au collège.
À bientôt peut-être
Philippe Colliard
P.S. : si vous ne l'avez pas déjà fait, s'il vous plaît, lisez l'article "Votez !" ... Et agissez :)
Il est juste en dessous de celui-ci
- ou, si vous n'avez cliqué que sur l'article actuel, il est ici :
Quelle est la différence enntre un spectre et une liste avec répétitions ? D'autre part, je ne suis aboslument pas d'accord avec la prétendue disarition de l'antéposition. Pour plus rare qu'elle soit,elle n'a pas disparu, y compris dans la langue courante. On dit toujours « un saint homme », pas « un homme saint ». Une jeune fille n'est pas une fille jeune, et de même pour une vieille fille. Je resterai donc fidèle au p.g.c.d. à l'ancienne ;o)
RépondreSupprimerBonsoir,
RépondreSupprimerIl me semble que le spectre de 4 est une partie du spectre de 2 mais que 4 n'est pas un diviseur de 2.
Bonjour,
RépondreSupprimerle spectre de 4 est {2a,2b} et celui de 2 est {2a},
donc le spectre de 2 est bien inclus dans celui de 4...
Et 2 est bien un diviseur de 4 - ce qui est plutôt rassurant, non ? :)